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Juin 2025

La Franc-maçonnerie avignonnaise

La Franc-maçonnerie est une organisation non religieuse et non politique, dont les principes prônent la liberté de pensée et le respect mutuel.

C’est une société de réflexion et d’analyse des grands courants de pensée. La vision générale est une fraternité universelle, égalitariste

dont  les membres s’attachent à œuvrer pour le progrès.

C’est un mouvement protéiforme, aux obédiences multiples,

dont les différentes loges reflètent les courants, ne suivent pas forcément les mêmes rites et portent leur propre système de valeurs.

Le XVIIIème siècle

La Franc-maçonnerie apparaît à Avignon en 1737, introduite par le marquis de Calvière, colonel de Dragons de l'Hérault et grand ami d’Esprit Calvet, qui possède un hôtel à Avignon et qui, semble-t-il, a été initié par un seigneur anglais proche du prétendant Stuart, le comte Balmérino. Le marquis écrit : «…la massonerie nous a éclairé sur les préséances, nous ne sommes jaloux que de conserver l’égalité, et par conséquent l’union, le bien le plus désirable de la vie ».

 

Avignon devient ainsi le premier centre maçonnique du Midi.

Alexandre Hesse - Le marquis de Calviere

Cette nouveauté suscite des réactions mitigées. Le marquis de Caumont écrit: « Il vient de s’établir icy une loge de Free-Maçons… Elle est, dit-on, complette mais je doute qu’elle aille plus loin. Je m’imagine que cette bizarre société n’est plus de mode à Paris, puisqu’on juge à propos de la transplanter en province. »

 

Outre le snobisme à rebours de ces propos, on trouve également un anticléricalisme assez réjouissant sous la plume du marquis : « Je suis surpris de l’établissement d’une loge de Free-Maçons en Papimanie, il n’a point été contredit jusqu’à présent mais sa propagation est très bornée et le nombre de frères se réduit à sept ou huit.» Et encore « Ses progrès n’allarmeront  pas la sainte Hermandad » autrement dit l’Inquisition et son tribunal.

Jean Valade - Le marquis de Caumont

1745 - Institut Calvet

Il est vrai que la création de 1737 n’a pas entraîné de grands développements de la loge avignonnaise .En effet, la papauté rejette formellement la doctrine franc-maçonne, et l’établissement d’une loge « de saint Jean » dans la ville des papes ne manque pas de surprendre. L'année suivante, la première Grande Loge de France institue Louis de Pardaillan de Gondrin, duc d’Antin, arrière-petit-fils de Mme de Montespan, « Grand Maître général et perpétuel des maçons dans le royaume de France ». Cette proclamation du duc d'Antin, un prince de sang, oblige la police à alléger sa surveillance sur la « société secrète » et Louis XV « oublie » de faire enregistrer par le Parlement la bulle papale de Clément XII condamnant la franc-maçonnerie.

Francesco Treviani - Clément XII

En 1743 une nouvelle loge est fondée : « l'ordre de la Félicité », où l'on reçoit des hommes et des femmes qui se nomment chevaliers et chevalières, sous l'autorité d'un grand-maître.

L'archevêque d'Avignon, Joseph de Guyon de Crochans, condamne l'ordre de la Félicité en dénonçant son caractère maçonnique et les « cérémonies frivoles et indécentes d’une société nouvelle de personnes qui sous le nom de Félicité s’est élevée dans le voisinage dont l’objet n’est sans doute pas le service de Dieu, ni un nouvel engagement pour une plus grande perfection, qui paraît au contraire n’être que la même société formée sous un autre nom et proscrite par le Saint Siège avec tant de zèle et d’éclat. » En dépit, ou peut-être à cause de l'interdiction, la société connait un grand succès. Les mises en garde n’ont que très peu d’influence et la « loge de Saint Jean » reprend ses activités. Ses statuts précisent que les maçons doivent « être fidèles à Dieu » mais que « le profond respect qui est dû à la loi divine oblige tous les frères à ne jamais en disputer en loge ». Ni d’ailleurs des affaires de l’Etat.

Banquet franc-maçonnique

Or les membres de la loge font largement partie de la haute société avignonnaise (dont deux abbés d’ancienne noblesse) et leurs fréquentes réunions se terminent souvent par un banquet, ce qui provoque l’intervention des autorités. Les Francs-maçons rapportent alors que « des nuages étaient prêts à s’élever et à obscurcir nos travaux. » Cependant d’une part l’Inquisition n’a plus guère de pouvoir ni de crédibilité à cette époque, d’autre part le sentiment religieux s’affaiblit, entraînant une distanciation par rapport aux interdits et aux condamnations de l’Eglise. Il n’empêche que les Francs-maçons avignonnais, pris entre l’autorité du pape et celle du souverain, préfèrent interrompre temporairement leurs travaux.

Il faut attendre 1774 pour que l’activité maçonnique reprenne malgré les difficultés, telle la loge « Saint René de l’Equité des Frères Unis ». Dès sa constitution, la loge «Saint Jean d’Ecosse de la Fidélité » est victime d’une descente de police qui impressionne beaucoup. On ajoute au nom « et de la Vertu persécutée ». Et il est décidé de fêter  le solstice d’été  à Roquemaure  en fondant  une autre loge appelée  « Saint Jean d’Ecosse des Vengeurs de l’Innocence ».

Pierre Mejamel - Léo Taxil Pardaillan s'opposant à une descente de police dans la loge

Les frères, résolus à maintenir une sorte de clandestinité, renoncent à leurs banquets et fêtes et s’efforcent « d’être extrêmement attentifs à ne point transgresser les dites lois pontificales » qui sont toujours en vigueur ainsi que le rappelle le frère Mabil, « inquisiteur général de la Foi dans la ville d’Avignon et tout le Comtat Venaissin ». Finalement une sorte de statu quo s’installe entre la discrète loge de « Saint Jean d’Ecosse de la Vertu persécutée» et les autorités.

D’autres loges se sont formées, telle « Saint Jean de la parfaite Union » placée dans l’obédience du Grand Orient de France en 1785. « C’est à la conduite du Maçon à faire l’apologie de la Maçonnerie. Soyez justes, bons, honnêtes dans vos mœurs, aimez vos frères, aimez tous les hommes, secourez les malheureux, montrez-vous constamment bon ami, bon parent, bon citoyen, sujet fidèle et en faisant respecter le nom de maçon, vous forcerez ceux qui nous gouvernent à vous accordez leur protection ou vous les ferez rougir de vous la refuser. »

Royal arche 13ème grade - DR Cerpa

De plus en plus, l’Eglise se trouve impuissante à empêcher les progrès de la Maçonnerie. Les Francs-maçons contraints d’abjurer devant le tribunal de l’Inquisition ne le font que superficiellement. Par exemple, le chanoine de Bassinet abjure en 1775 mais fait partie de la « Vertu persécutée »  l’année suivante ; M. de Pertuis abjure en 1776 mais reste l’un de plus actifs membres de cette loge jusqu’en 1789. L’abbé Corenson  écrira plus tard que l’Inquisiteur est « grand mangeur, de qui on pouvait facilement obtenir des privilèges en lui apportant quelque grasse poularde de la Barthelasse ».

Il n’empêche que les Francs-maçons rejettent l’athéisme et affirment leur croyance en Dieu, un dieu qui rassemblerait tous les hommes avec tolérance. Le succès de la Franc-maçonnerie à Avignon rejoint la tradition des confréries de pénitents. On trouve d’ailleurs de nombreuses personnes faisant à la fois partie d’une confrérie et d’une loge: par exemple l’abbé de Pérussis est membre de « Saint Jean de Jérusalem » et recteur des pénitents gris par la suite, ou encore le marquis d’Aigrefeuille, recteur des pénitents blancs et membre de « Saint Jean de la Vertu persécutée » l’année suivante.

Le marquis d'Aigrefeuille

Réception d'un apprenti - BnF

L’influence pontificale à Avignon à la fin du XVIIIème siècle ne repose plus sur un large consensus, trop en contradiction avec l’élan philosophique et social de l’époque. Avignon sera même à l’origine d’une loge écossaise de Paris,  « Le contrat social ».

Pendant la Révolution

Pendant la période révolutionnaire, les Francs-maçons se font si discrets qu’aucune trace n’est parvenue de leurs rencontres éventuelles. Cependant, la tenue des Etats Généraux avait suscité des espoirs de réforme chez les adeptes appartenant à la bourgeoisie commerçante et la noblesse de tendance libérale, mais leur modération les fait considérer comme ennemis par les plus extrémistes. En outre, la fin de la monarchie constitutionnelle est mal acceptée par de nombreux Francs-maçons qui ne sont pas préparés aux événements qui suivent. Quelques Avignonnais se manifestent, tel le marquis de Rognes, membre de la loge « Saint Jean d’Ecosse de la Vertu persécutée », qui publie un pamphlet pour revenir aux idéaux premiers de la Révolution, mais il est considéré comme contre-révolutionnaire et il doit fuir pour éviter la pendaison.

Après la Révolution, le jésuite Augustin Barruel prétend que les Francs-maçons l’avaient activement préparée, d’où l’idée persistante d’un complot maçonnique. Or il y a des Francs-maçons dans tous les camps : le duc de Luxembourg, Mirabeau, La Fayette, Choderlos de Laclos, David, Rouget de l'Isle… Louis Philippe d’Orléans, le cousin de Louis XVI qui vota sa mort, grand maître du Grand Orient une fois devenu « Philippe-Égalité » renie publiquement son appartenance avant d’être guillotiné. On dénombrait un millier de loges en France à la veille de la Révolution, 75 seulement pourront reprendre leurs travaux en 1800.

Augustin Baruel

Le XIXème siècle

Prince de Jérusalem 16ème grade - DR Cerpa

Au final, les loges avignonnaises disparaissent complètement et ne renaissent qu’au début de XIXème siècle. Huit loges sont créées entre 1803 et 1809, ce qui est beaucoup pour une ville d’environ 20 000 habitants. Leurs adeptes sont plus jeunes qu’auparavant et d’un milieu plus populaire (tourneur, limonadier, bottier, menuisier, sergent, ouvrier en soie, fabricant de peignes, maréchal des logis…), sans nobles ni religieux. Elles se font beaucoup de concurrence et les dissensions, plaintes et jalousies ne manquent pas.

Initiation d'un franc-maçon, début XIXème siècle

Cependant aucune de ces loges ne dure plus de dix ans malgré l’engouement pour le mouvement au cours du Premier Empire. Napoléon se pose en protecteur de la Franc-maçonnerie, qui lui est par conséquent dévouée, d’autant qu’il a placé à sa tête des dignitaires de l’Empire comme son frère Joseph ou Cambacérès, l’un des rédacteurs du code civil.

La police  de Louis XVIII (qui règne de 1815 à 1830) surveille de très près l’activité des loges, en appliquant un article du Code pénal napoléonien interdisant la formation de toute association de plus de vingt personnes sans l’agrément du gouvernement.

 

Lors de la Seconde Restauration après le désastre de Waterloo, les royalistes de la « Terreur blanche » s’en prennent aux loges maçonniques à cause de leur proximité avec l’Empire désormais honni, et détruisent la propriété du Vénérable de la loge avignonnaise  « des Vrais Amis », Toussaint Achard, qu’ils emprisonnent arbitrairement. C’est à cette époque qu’est assassiné le maréchal Brune à Avignon, lui-même franc-maçon.

Policiers de 1820

L’étroite surveillance se poursuit sous la Monarchie de Juillet et les loges avignonnaises ne comptent plus qu’un nombre très restreint de frères « privés des douceurs de la fraternité ». Un rapport signale « une loge rue Velouterie (« la Réunion bienfaisante »). Les individus qui la composent appartiennent à la classe ouvrière, ils se réunissent presque tous les soirs et professent des opinions républicaines, le but de la réunion est plutôt de parler politique que d’y faire des réceptions et des banquets. »

Les conflits internes, les accusations diverses, les malversations de certains (faux en écriture et même assassinat), toutes sortes de tribulations rendent l’existence des loges avignonnaises difficile. En novembre 1840, une terrible inondation dévaste « le temple (des Vrais Amis réunis) jusqu’au plafond des pas perdus ; en se retirant, elle emporta livres et tentures et beaucoup d’autres objets, le bâtiment qui renfermait le cabinet de réflexion situé au bout du jardin fut renversé ».

La situation s’améliore par la suite. Les Francs-maçons commencent à compter dans la cité, surtout au moment de la révolution de 1848 qui voit le rétablissement de la République et est accueillie avec enthousiasme. Les loges attirent de nombreuses recrues, de préférence d’opinion républicaine car la politique y a fait irruption. Alphonse Gent, représentant à la Constituante et maire provisoire d’Avignon, fondateur de la loge  « les  Vrais Amis réunis », manque de peu se battre en duel avec le comte Raousset Boulbon qui appartient à la même loge,

Anonyme - Alphonse Gent

La loge des « Vrais Amis réunis passe de quarante membres en 1848 à trois cents moins de deux ans plus tard. Ils louent un vaste local, le Café du Jeu de Paume, au niveau actuel de la rue Viala, comprenant le temple, une salle de billard, un salon de lecture, un service de limonadier… Des concerts et des bals y ont lieu, ainsi que des séances de magnétisme fort à la mode. 

Armand de Pontmartin écrit dans ses Mémoires : «Bientôt la catholique Avignon apprit que son café de  prédilection servait de lieu de rendez-

vous à Messieurs les francs-maçons. Ce fut le signal de la retraite pour les vieux habitués ; un seul, fervent chrétien et savant polyglotte, ne pouvait se résoudre à prendre ailleurs que sous sa chère tonnelle sa tasse de chocolat. Un matin, il arrive et se voit entouré de figures inconnues, mystérieuses, qui murmurent en le regardant : « Il pleut » or le temps était magnifique…/… Notre ami pensa qu’il avait affaire à des fous ou des sorciers, et s’enfuit du café. Longtemps après, il sut que dans la langue maçonnique, ce mot cabalistique « Il pleut ! » signifie « Méfiez-vous ! il y a un profane parmi nous. »

Cependant, de graves soucis financiers ont raison de la loge et elle ne renaît qu’en 1862, avec succès en dépit de la destruction de son local à cause du percement de la rue de la République trois ans plus tard.

Le Second Empire s’effondre en 1870 et la République est proclamée. Les loges provinciales ne se sont pas investies dans la Commune de Paris, bien que de nombreux Francs-maçons aient été inquiétés par la suite. Un nouvel atelier est fondé, « la Sincère Union ».

 

Au cours de la Troisième République, la Franc-maçonnerie évolue de façon notable, alors même que se développe un mouvement antimaçonnique. De plus les loges tendent à se politiser. Opposées au cléricalisme, elles deviennent l’appui le plus solide du parti républicain au cours de la Troisième République. Vilipendée comme la « synagogue de Satan », la Franc-maçonnerie va participer à la lutte républicaine contre les réactionnaires. A Avignon, en 1884 les « Vrais Amis Réunis » doublent le nombre de leurs membres, soit quatre vingts, parmi le personnel politique et administratif : sous préfets, maires, députés…

A partir de 1877, la notion de « Grand architecte de l’Univers », avatar maçonnique de Dieu, disparaît de la constitution du « Grand Orient de France », ce qui entraîne une rupture entre celui-ci et de nombreuses loges. La proclamation de la liberté absolue de conscience se heurte au credo initial de l’existence divine et de l’immortalité de l’âme.

 

A Avignon, les avis sont divisés. La loge des « Vrais amis Réunis » se rallie à la décision, mais la « Sincère Union » est partagée. Et dans la ville toujours très catholique, mieux vaut rester discrets. Mais les pouvoirs publics vont définitivement cesser d’inquiéter et tracasser les loges maçonniques, même si les cléricaux restent très virulents à leur égard.

A la fin du siècle, le courant catholique antimaçonnique devient violent, n’hésitant pas à recourir à la diffamation et à faire l’amalgame entre les Juifs, cibles de la droite conservatrice, et les Francs-maçons, sur fond d’affaire Dreyfus.

En 1898 la municipalité Pourquery de Boisserin, lui-même franc-maçon, octroie à la « Sincère Union », pour remplacer son local dans l’ancienne commanderie des Hospitaliers place Pie promise à la démolition, la chapelle des Frères des Ecoles chrétiennes rue des Ortolans, ce qui déclenche une violente campagne de presse contre cette décision.

« L’intrusion d’accessoires plus ou moins carnavalesques constitue un scandaleux et sacrilège défi aux consciences catholiques. Dans quelques jours, à la place même où s’élevait l’autel, sous le grand tableau qui représente la Sainte Vierge tenant l’Enfant Jésus dans ses bras, s’élèvera la contrefaçon de trône où s’assoira le vénérable devant une table quelconque, outrageusement qualifiée d’autel maçonnique. Un rite (…) écoulera ses invocations étranges, ses questionnaires bizarres, ses formules hétéroclites, son jargon cocasse et parodie des cérémonies religieuses, dans une enceinte vouée jadis à la prière et à la célébration des mystères de notre foi. »

 

La Croix d’Avignon et du Comtat donne une analyse fort partisane de l’évolution des loges au cours du siècle :

« La société des frères-maçons est sortie de son attitude silencieuse. Quelques uns de ses dignitaires s’étant emparés du pouvoir, les adeptes sont devenus  plus nombreux  et plus audacieux. Tous se sont hissés et installés dans les meilleures places et les plus grasses sinécures, d’où ils exercent leur action et leur influence sur tous les services publics /… / Le but réel de cette association diabolique tend à saisir le pouvoir et l’autorité ; à diriger l’instruction des générations nouvelles ; à nier l’existence d’un dieu puissant et clément et à détruire la religion catholique. »

La chapelle des Ortolans

devenu temple maçonnique - DR Cerpa

Quant à la loge des « Vrais amis Réunis », elle périclite au point de finalement fusionner avec la « Sincère Union » et partager le local de la chapelle des Ortolans.

Voir l'article sur la chapelle des Ortolans ici.

Le XXème siècle

En 1902, la loge de la « Sincère Union » organise de grandes fêtes en l’honneur d’Agricol Perdiguier, « Avignonnais la Vertu », mort en 1875, célèbre Compagnon du Devoir qui avait été initié à une loge parisienne trente ans plus tôt.

 

L’évolution de la société s’accorde avec certains des grands principes de la Franc-maçonnerie : la laïcité, le respect du pluralisme, la défense de l’esprit critique, le rationalisme, et on en trouve une influence sur de grandes lois, telle celle de la séparation de l’Église et de l’État de 1905.

Bannière en l'honneur d'Agricol Perdiguier - Loge d'Avignon

DR Cerpa

Or, si les conflits avec l’Eglise s’apaisent plus ou moins, les fondements universalistes de la Franc-maçonnerie sont mis à mal durant la Première Guerre mondiale. Un « bureau des relations internationales » entre loges maçonniques ne parvient pas à fédérer les diverses obédiences car les Francs-maçons des divers pays en conflit se sentent obligés de défendre leur drapeau, bien que certaines fraternisations ont lieu dans les camps de prisonniers.

 

Entre les deux guerres, la montée des dictatures entraîne une répression qui va culminer pendant la Seconde Guerre mondiale jusqu’à provoquer la quasi disparition de la Franc-maçonnerie puisque le gouvernement de Vichy l’interdit totalement et confisque tous ses biens.

Affiche de propagande - BnF

Fichier anttimaçonnique de Vichy - BnF

Elle est visée par une propagande antimaçonnique dès le début des années 1930 et la lutte contre le mouvement constitue une activité emblématique de la collaboration. Des listes de noms sont fournies à l'occupant nazi, les documents des institutions sont saisis. Pétain est un antimaçon convaincu : « La Franc-maçonnerie est la principale responsable de nos malheurs actuels, c’est elle qui a appris aux Français le mensonge et c’est le mensonge qui nous a menés où nous sommes. » 

La chapelle des Ortolans est pillée en novembre 1940, dix sept caisses de documents et d’archives disparaissent.

Dès le 6 mai 1944, le Comité français de libération nationale met en place des opérations de restitution. A Paris, les 8000 volumes et 80 tonnes d’archives et objets confisqués sont rendus au Grand Orient, qui confie ses archives historiques à la Bibliothèque nationale. Beaucoup de ces documents sont encore à découvrir et étudier. Un travail de recherche et de mémoire est en cours.

XXIème siècle

En mai 2000, un incendie se déclare dans la salle d’agapes de la chapelle des Ortolans, ce qui entraîne la fermeture du lieu, laissé depuis à l’abandon malgré son somptueux décor baroque. Deux ans plus tard, la «Grande loge de France » se porte acquéreur de l’étage supérieur du Grenier à Sel, le restaure entièrement en mettant en valeur sa belle charpente et les Francs-maçons avignonnais y installent le Temple.

DR Cerpa

DR Cerpa

DR Cerpa

DR Cerpa

La crise sanitaire de 2020, les confinements et le couvre-feu, entraînant la fermeture totale des temples ont empêché les francs-maçons de se réunir en "tenues", c'est à dire les rencontres rituelles en soirée entre membres d'une même loge, essentielles à la vie maçonnique et qui supposent beaucoup d'interactions physiques. En outre, les nouvelles initiations ont pris du retard.

 A Avignon, une huitaine de loges, certaines mixtes, ou uniquement masculines ou uniquement féminines, rassemblent aujourd'hui de 450 à 500 personnes. Ces loges très actives accueillent trois à quatre nouveaux membres par an. Elles proposent des activités variées, des réunions régulières pour travailler sur les symboles et les rituels, des conférences sur des thèmes philosophiques ou historiques, des réflexions sur des sujets tels que le colonialisme, l'éducation nationale, la fin de vie, des rencontres avec des personnalités extérieures, des actions philanthropiques en faveur des plus démunis, et des moments de convivialité et d'échange. 

De façon générale, l'adhésion à la Franc-maçonnerie est soumise à des critères stricts, tels que la reconnaissance de la dignité humaine, le respect des droits de l'homme, la croyance en un principe créateur, et l'engagement à travailler pour l'amélioration de soi et de la société. Le candidat doit être parrainé par un franc-maçon en activité et  passer par un processus de sélection rigoureux avant d'être admis comme membre.

La symbolique

Le poids des symboles est fort. Avant chaque tenue, ils permettent de se mettre en condition, pour ensuite entrer dans le moment d'échanges et réflexion, d'avoir un temps d'adaptation avant de passer du profane au sacré.

Ce qui suit n'est qu'un survol rapide des principaux symboles.

L’Oeil qui voit tout ou Oeil de la Providence, qui existe depuis 1797, représente l’œil de Dieu qui voit toutes les actions et pensées humaines.

DR Cerpa

Le pavé mosaïque est le plan du terrestre, le miroir de la voûte céleste. Les carrés formant d’autres carrés, plus grands, montrent que les différents microcosmes limités s’intègrent dans le macrocosme illimité et éternel. En tant que jeu d’échecs, il symbolise le temple idéal dont la perfection matérielle donne accès aux mystères célestes et à la connaissance.

L’équerre et le compas : l’équerre  rappelle l'importance de vivre selon des principes éthiques stricts, et le compas la nécessité de modérer ses passions et trouver un équilibre dans l’existence.

DR Cerpa

maillet president de chapitre.jpg

Le maillet du président de chapitre représente l’autorité du franc-maçon. Outil utilisé pour casser les aspérités d’une pierre, c’est un rappel à se débarrasser de certains vices et de maintenir un cœur pur, moral et spirituel.

DR Cerpa

DR Cerpa

La corde nouée symbolise le lien  entre les hommes. Les nœuds ont des propriétés décoratives permettant à la corde d’ornementer et de signifier.

L’étoile flamboyante est l’aboutissement du voyage mental d’un franc-maçon, qui cherche à utiliser ses connaissances pour le guider comme une étoile dans le ciel nocturne.

La lettre G représente pour certains God en anglais (Dieu), pour d’autres la Géométrie, ou encore  le mot Gnose, la connaissance des mystères spirituels.  

DR Cerpa

Ordo ab Chao : « l’ordre à partir du chaos »,  incite le franc-maçon à trouver l’ordre dans le chaos apparent, celui du monde, de la société ou de sa propre personne.

Désormais donc, tout en conservant les rituels et les recherches philosophiques, les francs-maçons se consacrent à des thèmes moins ésotériques et plus en rapport avec l’évolution sociale. Les loges travaillent sur des sujets d’actualité et des faits de société, et leurs conclusions collectives apportent des compléments précieux aux rédacteurs. Les synthèses remontent au niveau gouvernemental et offrent des pistes de réflexions indispensables. Une fois par an, les grands maîtres des loges sont invités à l’Elysée.

Tous nos remerciements à M. Bouix, responsable musée, archives, bibliothèque et évènementiel, de nous avoir accueillis et répondu à nos questions concernant les loges maçonniques d’Avignon.

Statuts compagnonniques - Archives départementales du Vaucluse

Bibliographie

 

C. Mesliand - Franc-maçonnerie et religion à Avignon au XVIIIe siècle - Annales historiques de la Révolution française 1969

H. Chobaut - Mémoires de l'Académie du Vaucluse – 1924

Michel Chazottes - La franc-maçonnerie avignonnaise et vauclusienne au XIXe siècle

Diane-Marie Palacio Russo - L’influence de la franc-maçonnerie sur l’élaboration de la norme sous la Vème République

Martine Poulain - La franc-maçonnerie pendant la Seconde Guerre mondiale (BnF)

https://glfriteecossaisprimitif.org

https://essentiels.bnf.fr/fr/societe/spiritualites/

www.larepubliquedespyrenees.fr

https://www.ledifice.net

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